Jean-Luc Hees : bonne santé, bonheur et bien-être au travail
Publié le 4 Janvier 2012
Le président de Radio France transporte son personnel du Château de la Radio au Théâtre du Châtelet pour lui présenter ses vœux les plus sincères. Nous l’en remercions et formulons pour lui tous nos souhaits de clairvoyance pour cette année.
Ainsi, pour traiter des risques psychosociaux, M. Hees n’aurait-il plus recours aux services d’un cabinet extérieur onéreux, choisi quatre mois avant même que la démarche soit présentée aux CHSCT, instances qui traitent justement des conditions de travail. Nous éviterions les extravagants résultats de l’enquête où l’on découvre que la moitié des facteurs de stress identifiés sont sans risque à Radio France !
En attendant la grande révolution du bien-être à Radio France, M. Le Président ne manquera certainement pas de souhaiter le meilleur à ses amis du Mouv’ et de France Musique :
- Au Mouv’, on aimerait pourtant savoir comment on fait pour insuffler du civisme aux jeunes auditeurs avec le ton faussement branché de producteurs qui semblent de plus en plus constituer l’équipe réserve de France Inter, où ils auraient sans doute encore toute leur place.
- Les personnels de France Musique doivent être bien affligés de continuer à faire partie des « deux petits soucis » dont ne se cache jamais notre Président. Ces malheureux mots ont été prononcés par notre Grand chef d’orchestre lors de son audition du 14 décembre à l’Assemblée nationale.
Une politique salariale verra peut-être le jour où nos salaires seront enfin relevés pour compenser le blocage du point d’indice depuis 13 ans. En attendant, comme en chaque début d’année, nous subissons les traditionnelles hausses de factures.
On en profitera pour s’attaquer aux disparités salariales, ainsi par exemple un écart inexplicable pouvant aller jusqu’à 80% (15 000 € annuel net) entre deux collègues dont les fiches de poste sont strictement identiques. Cela crée une belle ambiance de travail !
Concernant le positionnement des métiers sur une échelle de salaire, la négociation du Nouvel Accord Collectif parait aujourd’hui tout aussi biaisée que toutes les négociations obligatoires : NAO, Gestion prévisionnelle des emplois et compétences, seniors, handicap, égalité Homme/Femme. A propos de cette dernière, 30 mesures sont attribuées chaque année dans la plus grande opacité, avec des critères qui nous échappent totalement.
On impose un taux d’activité à temps partiel subi à certain-e-s salarié-e-s, notamment les chargées d’accueil. Comment fait-on pour vivre avec 600 ou 700 € par mois ?
Nous aimerions que nos carrières soient mieux suivies. Il n’est pas normal de retrouver des salariés sur des affectations temporaires renouvelables à souhait, et d’autres toujours en attente de mobilités malgré plusieurs entretiens à la DRH. Ainsi pourrissent certaines situations professionnelles et relationnelles.
Halte à la précarité :
- de personnels qui cumulent d’innombrables CDD sur plusieurs années,
- de cachetiers, en particulier les producteurs et collaborateurs spécialisés, de plus en plus sous tension !
Fait nouveau, voici venu l’emploi de stagiaires pour pallier les sous-effectifs chroniques, pratique pourtant dénoncée sur nos antennes ! Remarquez, on dit aux patrons du secteur privé :
« Ne le faites pas ! », on ne leur dit pas : « Ne le faisons pas ! ».
Pour ce qui est de l’aménagement des espaces de travail, on évitera de reproduire l’entassement du personnel en open space, pratiqué par exemple à France Info, à tel point qu’on a installé des espaces de travail sur le palier des ascenseurs.
Avec les derniers réaménagements, nous voyons disparaître tout espace d’intimité, de confidentialité ou de tranquillité. Le self est oppressant et les sanitaires dépourvus du minimum d’isolation phonique, de patères, voire de balayette.
Les relocalisations dans la tour centrale ont introduit de la verticalité dans la répartition physique des services. Malgré le retour d’expérience de Mangin, qui rendra peut-être Inter minable la 8eme année, on reproduit le même schéma. Au lieu de se croiser dans le couloir, on se croise dans l’ascenseur ou dans l’escalier. A l’étage on vit la promiscuité, dans l’immeuble l’isolement. On casse tout le lien que permet l’architecture de la Maison ronde.
Parlons également de l’état du réseau informatique qui incite des salariés à se connecter à leurs domiciles pour réaliser en 10 mn ce qui aurait pris 1 heure à Radio France. Nous attendons un réseau et des progiciels en adéquation avec le travail demandé.
Reconsidérons toutes les tâches redondantes, notamment l’inflation continue du copier-coller liée au multimedia, toujours en quête d’une stratégie claire à l’échelle du groupe.
Quant à l’organisation du temps de travail :
- Il est des secteurs où il devient impossible de planifier ses congés à force de faire travailler les équipes à flux tendu. On nous demande de les prévoir de plus en plus en amont, on nous les accorde de plus de plus tard.
- Il nous faut bannir la planification, anarchique et abusive, du vendredi pour la semaine suivante là où sont pratiqués les horaires variables hebdomadaires. Ce régime horaire rend improbable tout projet personnel et très compliquée une vie de famille.
- Un bilan annuel des horaires en modulation doit être présenté en CE comme le prévoit l’article L 212-8 alinéa 6 du Code du travail.
Les redéploiements de postes à marche forcée, conjuguée à une augmentation de la charge de travail, rendent certains postes insupportables et dangereux pour la santé. On n’est plus très loin du burn-out, syndrome d’épuisement professionnel.
Les réorganisations successives des directions transversales, plus particulièrement la Sabig et la TTN, liées à des luttes de pouvoir intestines et mesquines, pourraient peut-être se calmer. Les personnels concernés retrouveraient un peu de sérénité, libérés de l’enchainement d’ordres et contre-ordres, de directives qui obligent à de grandes contorsions pour être applicables.
Il faudra reconsidérer le respect dû à l’ensemble du personnel, qu’il soit technique, administratif, ouvrier, des services du nettoyage, du courrier, du standard, de l’accueil ou de la sécurité. Comment peut-on encore assister à une scène où un collaborateur renommé déverse son arrogance sur un surveillant qui ose lui demander son badge à l’entrée ?
Que cessent les débordements de petits chefs sans aucune culture de management ! On pense aux baronnies des locales et autres directions parisiennes. Il est fini le temps des contremaîtres, non ?
L’Unsa attend de la direction que soient prises en compte les réalités de nos activités, l’évolution concrète de nos métiers et de nos outils techniques. Par exemple, le déni de réalité de la DPA l’amène à attribuer la fonction de technicien du son à tout technicien dont l’activité à plein temps consiste à faire de la captation et du montage video.
Avant de prononcer vos vœux, M. Le Président, entendez dans quelles conditions vos salariés travaillent. Vous comprendrez alors que le plan d’action proposé ne remet en rien en cause les principaux facteurs de mal être.