Crise sur crises à Radio France
Publié le 1 Juin 2015
Crise budgétaire
L’entreprise est condamnée à réduire sa masse salariale faute de budget suffisant pour supporter l’augmentation mécanique des charges d’exploitation. L’Etat a serré la vis en 2012 dans sa politique de réduction de la dette publique et contraint l’ensemble des services publics à faire avec moins. RFI et France Télévisions ont déjà été touchées. Radio France, cible du rapport de la Cour des comptes et des rapports parlementaires, prévoit un plan de réduction d’effectifs dans le Contrat d’objectifs et de moyens (COM). Ce plan serait mis à la négociation dès septembre, délai imposé par le plan d’affaire pour le retour à l’équilibre. Nous contestons une approche purement comptable qui conduirait à la désorganisation des services, à la mise en cause de nos programmes et nos missions.
Crise de gouvernance
Les discussions ont cours entre la présidence de Radio France et les ministères de la Culture et du Budget. Mais la nomination du président sur la base d’un projet stratégique est de la responsabilité du CSA. Toutes les parties prenantes se renvoient la balle, chacune en pleine crise de crédibilité : les affaires Gallet (bureau et conseillers), ce petit côté CSA nostra dans les nominations à Radio France et France Télévisions, et la Saal affaire : le ministère lui confie un poste de chargée de mission juste un mois après l’avoir débarquée de l’Ina pour des faits graves. Nous sommes face à des autorités controversées.
Crise d’identité
L’étau budgétaire conduit l’entreprise à des choix en contradiction avec son cahier des missions et des charges issu de la loi de 1986. La volonté d’accroître ses ressources propres avec des annonceurs publicitaires privés et l’organisation à la Maison de la Radio d’évènements privés posent bien sûr des questions éthiques et déontologiques. La production radiophonique ou musicale est altérée par la location de studios, par la réquisition de techniciens pour Pernod-Ricard, Samsung, etc. Radio France doit jouer un rôle clé dans la prescription de nouveaux talents, la découverte, l’ouverture au monde. La suppression d’émissions publiques, la réduction de moyens pour les reportages et le documentaire, ou la difficulté à faire prendre en charge le déplacement d’invités ou de musiciens compromettent l’identité de Radio France en tant qu’acteur culturel.
Crise sociale
La perspective d’une réduction drastique des effectifs rend le climat de l’entreprise très sombre. Pour beaucoup de salariés, le ressort est déjà cassé. L’incertitude et l’indécision se sont emparées des esprits. On assiste à un gigantesque gâchis. Certains complètent leurs CV pour démarcher. L’erreur suprême, c’est prétendre mener de front les négociations d’un plan de départs volontaires, du Nac et d’un accord multimédia en même temps que se mènerait la réflexion sur l’évolution des modes de production, réflexion que nous souhaitons la plus participative possible, à la hauteur des enjeux. Il faut se projeter malgré la fermeture temporaire des studios moyens et l’objectif avoué par Jean-Paul Cluzel dans sa réponse à la Cour des comptes de la réduction du nombre de studios.
L’Unsa demande à ce qu’aucun plan de réduction d’effectifs ne soit mis en place avant les conclusions de la réflexion sur les modes de production en juin 2016. Rappelons que plus de mille salariés sont concernés par la réforme qui en découlera.
L’évolution de nos outils et nos organisations et l’émergence de nouvelles compétences doivent s’inscrire au minimum sur toute la durée du COM et non sur 2 ans. L’évolution des effectifs ne peut la devancer, l’Etat et la direction de Radio France commettraient une faute en la brusquant.